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Du superlatif au très relatif
Une centrale aussi "performante", la plus puissante, la plus moderne et la plus sûre du monde, prête à exporter son infaillibilité 100% française et déjà dans les choux. Bravo l'innovation sur la palier N4 ! Les deux premières tranches N4, celles de Chooz, passent leur temps à être arrêtées. Et quand Civaux démarre, soi-disant après un retour d'expérience positif de Chooz, voilà que le réacteur perd de l'eau de son circuit primaire ! Heureusement le circuit d'eau borée et la piscine des combustibles ne sont pas loin pour compenser les pertes. Défauts de conception, problèmes métallurgiques, vanne fuyarde, signalisation défaillante ou inexistante des voies RRA (car pourquoi a-t-il fallu aussi longtemps pour localiser la fuite ?), est-ce cela l'innovation du palier N4 ? Et que dire du reste ? Des guides de grappes de commandes pour lesquels il a fallu faire marche arrière, de la volute qui, refusée à Chooz, est venue à Civaux avant d'être refaite ? Ou bien encore de la turbine de Chooz, la belle Arabelle, qui après un an de turbin a déjà des fissures au point qu'on va déménager des pièces d'ici pour les emmener là-bas (Chooz se trouve dans les Ardennes). Ces va et vient seraient grotesques s'ils ne concernaient pas la sécurité. Ils nous éclairent radicalement sur le manque de fiabilité de la technologie nucléaire dont une autre vulnérabilité réside dans sa complexité même. Les circuits RRA des 4 réacteurs du palier N4 vont être vérifiés voire reconçus. La DSIN annonçait le 28 mai dernier son accord pour "décharger le combustible des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Chooz, de même conception que la centrale de Civaux [...] pour examen de leurs circuits RRA". Mais est-on sûr qu'il n'y a pas d'autres centrales à contrôler ? Quand à Civaux, l'avertissement est accablant : On imagine ce qui se produirait si un pépin du même tabac se produisait, lors d'une montée en puissance, sur d'autres canalisations... Il faut être myope et accroc à la communication EDF pour faire une confiance absolue à la technologie nucléaire, franco-française ou pas. Il arrive à quelques attentistes, le type "contemplatif mou", d'admettre que l'état des centrales d'Europe de l'Est est tel que l'une d'elle va forcément "péter" un de ces jours. "Alors", concèdent-ils, "l'opinion publique vous donnera raison". Mais est-ce bien à l'Est que le prochain accident nucléaire majeur va se produire ?
10 juin 1998, Stop Civaux
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